Ils acceptent parce que nous rêvons tous d’un monde bienveillant, attentif à nous. Un monde qui prenne soin de nos esprits et de nos corps stressés, qui nous protège et nous choie, nous aide et corrige nos erreurs, qui nous filtre l’environnement et ses dangers. Un monde qui s’efforce d’aménager un technococon pour notre bien-être. L’intelligence ambiante pourvoit à ça. Elle nous écoute et elle nous répond. Elle courbe cette bulle autour de nos solitudes. Elle la tapisse d’objets et d’interfaces cools. Bien sûr, elle en profite pour nous espionner jusqu’au slip et pour nous manipuler jusqu’à la moelle ! Mais au moins, elle s’occupe de nous, ce que plus personne ne fait vraiment… C’est un cercle vicieux. Plus nos rapports au monde sont interfacés, plus nos corps sont des îlots dans un océan de données et plus nos esprits éprouvent, inconsciemment, cette coupure, qu’ils tentent de compenser. Et ils la compensent en se reliant à des objets, en touchant et en parlant à des dispositifs qui nous rassurent – et nous distancent en même temps. Un réseau social est un tissu de solitudes reliées. Pas une communauté.
Alain Damasio